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Le congé de paternité : les récentes évolutions en France et hors de nos frontières


Le congé de paternité : les récentes évolutions en France et hors de nos frontières

Depuis le 1er juillet 2021, la durée du congé de paternité et d’accueil de l’enfant est passée de 11 à 25 jours en France. Qu'en est-il aujourd'hui ?


Sommaire :

  1. Les évolutions constatées concernant le congé de paternité

  2. Qui peut bénéficier du congé de paternité ?

  3. Quelles sont les nouveautés depuis juillet 2021 ?

  4. Mise en œuvre du congé de paternité

  5. Les évolutions récentes hors de nos frontières


FoxRH cabinet de recrutement RH et Paie







1) Les évolutions constatées concernant le congé de paternité


Jusqu'à la création du congé de paternité en 2002[1], l'accueil de l’enfant n'était juridiquement envisagé qu'au moyen du congé de maternité. En effet, le congé de naissance prévu au bénéfice du père à l'occasion de la naissance de l'enfant, n'était et n'est d'ailleurs toujours[2] que d'une durée légale de 3 jours. Le congé de naissance est une création de la loi n° 46-1085 du 18 mai 1946 tendant à accorder au chef de famille, salarié, fonctionnaire ou agent des services publics, un congé supplémentaire à l'occasion de chaque naissance dans son foyer.


Avant d’exposer les récentes évolutions intervenues au 1er juillet 2021 qui se veulent incitatives, un rappel des bénéficiaires du congé de paternité sera évoqué. Enfin, une sélection des dispositifs des congés de paternité hors de nos frontières nous permettra d’observer les différences entre les dispositifs mais une volonté commune d’assurer un partage plus égal des responsabilités parentales entre les femmes et les hommes.



2) Qui peut bénéficier du congé de paternité ?


Les potentiels bénéficiaires du congé de paternité sont les salariés mais aussi les travailleurs non salariés et les professions libérales. En outre, un décret du 4 novembre 2002 avait étendu le bénéfice de ce congé aux chômeurs indemnisés et aux stagiaires en formation[3].


Pour les bénéficiaires salariés, aucune condition liée à l’ancienneté dans l’entreprise, à l’effectif de l’employeur ou au type de contrat de travail (CDD, CDI, apprentissage, temps partiel, etc.) n’est exigée pour bénéficier du congé de paternité et d’accueil de l’enfant.


Le congé de paternité n'est pas réservé exclusivement au père, il peut être attribué au conjoint, au concubin salarié de la mère ou à la personne salariée liée à elle par un pacte civile de solidarité[4]. La partenaire homosexuelle de la mère en est donc bénéficiaire.

Au nom de l'interdiction des discriminations, le Défenseur des droits considère que le congé de paternité doit être attribué, non seulement au père biologique, mais également, si c'est le cas, à son conjoint (marié ou pacsé) du même sexe (Défenseur des droits, déc. no 2020-036, 9 oct. 2020).


La naissance d'un même enfant peut par conséquent donner lieu à l'attribution du congé à deux personnes différentes, le père et la personne qui partage la vie de la mère.


3) Quelles sont les nouveautés depuis juillet 2021 ?


Une durée de congé allongée


Pour tous les enfants nés à compter du 1er juillet 2021, ou nés avant le 1er juillet 2021 mais dont la naissance était supposée intervenir à compter de cette date, la durée maximale totale du congé de paternité est désormais, sauf exception, de 25 jours calendaires (32 en cas de naissance multiples). La prise de ces jours fait désormais l'objet d'une répartition en deux périodes :

  • la première comporte les 4 premiers jours du congé de paternité ;

  • la seconde comporte les 21 jours restants du congé (ou les 28 jours restants en cas de naissances multiples).

Un congé en partie obligatoire : les 4 premiers jours du congé de paternité (première période)


Pour le salarié, une période de congé de 7 jours, composée de 3 jours de congé de naissance[5] et de

4 jours de congé paternité, doit être accordée et prise par le salarié obligatoirement à la naissance de l’enfant. L’employeur a interdiction d’employer le salarié pendant cette période.


Le congé de naissance, qui précède le congé de paternité doit être pris et commence donc à courir, au choix du salarié bénéficiaire, dès le jour de la naissance de l'enfant ou le premier jour ouvrable qui suit.


L’article L.1225-35-1 du Code du travail[6] précise désormais que lorsque l'enfant naît au cours d'une période de congés payés ou d'un congé pour événements familiaux, l'interdiction d'emploi, qu'il s'agisse des 4 premiers jours du congé de paternité ou du congé de naissance, débute à l'issue de cette période de congés. Ces dispositions légales mettent ainsi fin à la jurisprudence selon laquelle le salarié en congé à la date de naissance de l'enfant ne peut bénéficier d'une prolongation de ce congé de trois jours pour cause de naissance[7].


Un congé à prendre dans les 6 mois à compter de la naissance et un congé dorénavant fractionnable pour partie (deuxième période du congé)


Le délai du congé paternité est allongé pour permettre, par exemple, au second parent de prendre les 21 jours restants du congé paternité dans la continuité du congé maternité, permettant ainsi de prendre le relais. (deuxième période).


Ces 21 jours (28 en cas de naissances multiples), qui ne font pas l'objet d'une interdiction d'emploi :

  • ne peuvent être pris que dans les 6 mois suivant la naissance de l'enfant (ce délai était de 4 mois auparavant), sauf exceptions ;

  • peuvent être pris en deux périodes d'une durée minimale de 5 jours chacune (ce fractionnement n'était pas possible auparavant).


Des régimes spécifiques en vigueur depuis le 1er juillet 2019


Des règles particulières concernent l'hypothèse d'une hospitalisation de l'enfant, dès sa naissance, dans une ou plusieurs des unités de soins spécialisés suivantes[8] :

  • unités de néonatalogie mentionnées à l’article R.6123-44 du Code de la santé publique ;

  • unités de réanimation néonatale mentionnées à l'article R. 6123-45 du même code ;

  • unités de pédiatrie de nouveau-nés et de nourrissons mentionnées à l'article D. 6124-57 du même code ;

  • unités indifférenciées de réanimation pédiatrique et néonatale mentionnées à l'article D. 6124-62 du même code.


Dans ce cas, un droit supplémentaire à congé de paternité a été créé concernant les naissances intervenues à compter du 1er juillet 2019[9]. Il s'agit d'un droit à congé de paternité supplémentaire de 30 jours consécutifs.


Dans ce cas, l'interdiction d'emploi continue de ne porter que sur les 4 premiers jours du congé. Par ailleurs, le point de départ du délai de 6 mois pour bénéficier - éventuellement en deux temps - de la seconde période du congé de paternité, est reporté à la fin de l'hospitalisation de l'enfant.


Des règles particulières concernent également l'hypothèse du décès de la mère de l'enfant pendant le congé de maternité. Dans ce cas, le point de départ du délai de 6 mois pour le bénéfice de la seconde période du congé de paternité est reporté, le cas échéant, à la fin de la suspension du contrat de travail dont peut bénéficier le père en application de l’article L.1225-28 du Code du travail. Pour mémoire, cet article instaure en effet, dans l'hypothèse du décès de la mère entre la naissance de l'enfant et la fin de l'indemnisation au titre du régime d'assurance maternité, un droit à congé indemnisé pour le père au titre de la durée restant à courir entre la date du décès et la fin de la période d'indemnisation dont aurait bénéficié la mère.


4) Mise en œuvre du congé de paternité


Délais de prévenance


Les délais de prévenance de l’employeur sont les suivants :

  • en vue du bénéfice de la première période du congé de paternité de 4 jours : un mois au moins avant la date prévisionnelle de l'accouchement ;

  • en vue du bénéfice de la deuxième période du congé de paternité : un mois au moins avant le début de la prise de tout ou partie des 21 jours (28 jours en cas de naissances multiples), ou, si cette prise est fractionnée, un mois au moins avant le début de chacune des deux fractions d'au moins 5 jours chacune.


À l'obligation de respecter ces délais de prévenance s'ajoutera, le cas échéant, celle d'informer l'employeur « sans délai » lorsque :

  • l'enfant étant hospitalisé, dès sa naissance, dans une ou plusieurs des unités de soins spécialisées précitées, le salarié souhaite bénéficier, en tout ou partie, de son droit à congé de paternité supplémentaire - c'est-à-dire de tout ou partie des 5e à 30e jours adjoints, dans cette hypothèse, aux 4 premiers jours du congé de paternité ;

  • l'enfant étant né avant la date prévisionnelle d'accouchement, le salarié souhaite débuter la prise de tout ou partie de la deuxième période du congé de paternité au cours du mois suivant la naissance.

Les dispositions légales précisent que le non-respect du délai de prévenance relatif à la date prévisionnelle de l'accouchement ne fait pas obstacle à l'interdiction d'emploi pendant les congés de naissance et les 4 premiers jours du congé de paternité[10].


Indemnisation pendant le congé


Le contrat de travail du salarié en congé de paternité est suspendu. Par ailleurs et indépendamment de la prise, ou non, du congé de paternité, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail d'un salarié pendant les 10 semaines suivant la naissance de son enfant, sauf faute grave de l'intéressé ou impossibilité de maintenir son contrat pour un motif étranger à l'arrivée de l'enfant[11].


Le salarié en congé de paternité reçoit l'indemnité journalière applicable aux salariées en congé de maternité, selon les mêmes conditions[12]. Ainsi, il doit notamment justifier de 10 mois d'affiliation à la date du début du congé de paternité. Pour percevoir l’indemnité de congé paternité, les travailleurs indépendants doivent eux aussi justifier d’une période de 10 mois d’affiliation.


Suites du congé de paternité


À l'issue du congé de paternité, le salarié doit retrouver son emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente. À noter que, contrairement au congé de maternité, le congé de paternité n'est pas toujours assimilé à du temps de travail effectif pour le calcul des droits du salarié.



5) Les évolutions récentes hors de nos frontières


En Europe


Dans les pays européens, les droits à congés réservés aux pères ont été étendus petit à petit au fil des dernières années, en réponse au souhait qu'exprimait le Conseil européen dans sa recommandation du 31 mars 1992 concernant la garde des enfants, à savoir « une participation accrue des hommes, afin d'assurer un partage plus égal des responsabilités parentales entre les hommes et les femmes ».


C’est la directive 2019/1158 du 20 juin 2019 concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants qui fixe dorénavant des exigences minimales en matière de congé de paternité.

Elle prévoit que les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les pères ou, le cas échéant, les personnes reconnues comme seconds parents équivalents par la législation nationale, aient le droit de prendre un congé de paternité de dix jours ouvrables, lequel doit être pris à l'occasion de la naissance de l'enfant du travailleur.


Récemment, un allongement du congé de paternité a eu lieu également dans certains pays voisins :


- En Belgique, le congé paternité est passé de 10 à 15 jours le 1er janvier 2021.

- En Espagne, depuis le 1er janvier 2021, le congé de paternité dure 16 semaines soit une durée équivalente à celui accordé aux mères. Il est rémunéré à hauteur de 100% du salaire et non transférable à l'autre parent.


Il est également intéressant de relever que :


- En Allemagne, il n’existe pas de congé de paternité légal mais un congé parental accessible aux deux parents.

- En Norvège, le congé paternité est payé à 100% du salaire dans une limite de 60.000 euros par an pour une durée minimum de 15 semaines, auxquels s’ajoutent 2 semaines dès la naissance de l’enfant. La durée du congé de paternité peut s’étendre jusqu’à 34 semaines soit plus de 8 mois selon certaines conditions.

- Aux Pays-Bas, il existe un congé de naissance (geboorteverlof) d’une semaine rémunéré par l’employeur et de 5 semaines durant lesquelles une prestation équivalant à 70% du salaire est versée au salarié.

- Au Royaume-Uni, il est possible de bénéficier d’un congé de paternité rémunéré d’une durée d'une ou deux semaines Le congé de paternité peut être pris à compter du jour de la naissance et jusqu'au 56e jour qui suit celle-ci.


- Le congedo di paternità italien consiste en sept jours de congé payé obligatoire à prendre dans les cinq mois de la naissance de l’enfant, mais forcément en une seul fois.


Au-delà de l’Europe


Le gouvernement japonais s'est récemment fixé un objectif : que le pourcentage de prises de congés paternité, à 12 % en 2020, passe à 30 % en 2025. Le taux de prise de congés paternité parmi les salariés éligibles au cours de l'année 2020 a dépassé les 30 % dans 42 des 100 plus grandes sociétés nippones, et dans 20 d'entre elles, le taux atteint même 70 %. Une impulsion a sans doute été en partie donnée par le ministre de l’Environnement japonais, Shinjiro Koizumiaui qui a pris un congé de 14 jours en 2020.


En conclusion, il peut être observé que les évolutions législatives ont permis une progression dans la prise du congé de paternité. En France, selon une étude réalisée il y a quelques années et publiée par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, le droit au congé de paternité était alors exercé par 7 pères sur 10[13].




Bénédicte LITZLER

Aurélie DAVOULT

Nada EL KHISHIN

Cabinet Schmidt Brunet Litzler Avocats




FoxRH cabinet de recrutement RH et Paie


[1] L. n° 2001-1246, 21 déc. 2001 [2] Articles L.3142-1,3°, L.3142-4,3° et L.1225-35-1, alinéa 1er [3] Décret n° 2002-1324, 4 novembre 2002 [4] Article L.1225-35 du Code du travail [5] Articles L.1225-35-1 et L. 3142-1, 3°du Code du travail [6] L. n° 2020-1576, 14 déc. 2020, art. 73 [7] Cass. Soc. 11 octobre 1994, n°93-42.310. [8] Arrêté n° SSAS1912500A, 24 juin 2019 fixant les unités de soins spécialisées visées par l’article L.1225-35 du Code du travail pour l'attribution du congé de paternité en cas d'hospitalisation immédiate de l'enfant [9] Loi n°2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement pour la sécurité sociale pour 2019 [10] Article L.1225-35-1 du Code du travail [11] Article L.1225-4-1 du Code du travail [12] Articles L.331-8, L.331-3, L.313-1, R-313-1 et R.313-3 du Code du travail [13] Revue Etudes et Résultats de la DREES, mars 2016, n°0957

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