Le congé paternité trouve sa source dans un but légitime, celui de renforcer la responsabilité éducative des pères à l’égard de leurs enfants par un investissement précoce auprès de ceux-ci et en permettant un plus grand partage des tâches domestiques entre hommes et femmes.
A l’origine, seul le père biologique du nouveau-né bénéficiait, en sus du congé légal de 3 jours liés à la naissance, de 11 ou 18 jours calendaires consécutifs en cas de naissances multiples, selon l’article fondateur L. 1225-35 du Code du travail.
Pendant toute la durée de ce congé, le contrat de travail est suspendu et le père salarié n’est, en conséquence, pas rémunéré : seules des indemnités journalières de sécurité sociale lui sont versées.
Véritable socle juridique en matière de congé paternité, l’article L. 1225-35 du Code du travail n’a cessé d’évoluer de sorte que, les pères biologiques ne sont plus les seuls à être responsabilisés.
En effet, la loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012 a ouvert le congé paternité « au conjoint salarié de la mère ou la personne salariée liée à elle par un pacte civil de solidarité ou vivant maritalement avec elle » et ce, dans un souci d’égalité au sein d’un couple pris dans sa dimension la plus large[1].
Désormais, le congé paternité ne repose plus sur la seule filiation juridique avec l’enfant.
Une fois informé, l’employeur ne peut s’opposer ni au départ ni au report de congé[2], et encore moins licencier celui qui prend ce congé qui, en tout état de cause, est protégé pendant 10 semaines, après la naissance de l’enfant[3].
Comme pour le congé maternité, cette protection n’est que relative dans la mesure où il est formellement interdit à l’employeur de rompre le contrat de travail pendant cette période sauf en cas de faute grave ou impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif totalement étranger à l’arrivée de l’enfant[4].
Plus récemment, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019[5] a créé un nouveau congé de paternité et d’accueil - non fractionnable - de maximum 30 jours consécutifs, en cas d’ « hospitalisation » de l’enfant, après sa naissance, ce congé devant impérativement être pris dans les 4 mois suivants la naissance de l’enfant, après ou avant le congé parental « classique »[6].
Il doit être précisé que l’hospitalisation de l’enfant « dès la naissance » suppose qu’elle soit immédiate c’est-à-dire que le nouveau-né ne soit pas sorti de la maternité vers son domicile avant d’être hospitalisé[7].
Bien que la France s’efforce à concilier vie professionnelle et vie familiale pour les travailleurs devenus parents et, ainsi, pallier les inégalités hommes-femmes, elle reste néanmoins en marge des autres pays européens.
A titre d’illustrations, il convient de citer :
le système norvégien qui garantit 14 semaines de congés après la naissance de l’enfant pendant lesquelles les parents perçoivent tous deux leur rémunération ;
le système suédois qui réserve 2 mois de congés au père lequel est payé à hauteur de 80% de son salaire ;
le système finlandais qui offre 54 jours de congés au père ; en plus, il peut partager avec la mère 26 semaines de congé parental au cours duquel ils sont payés de 70 à 90% du salaire ;
quant au système espagnol, le père dispose de 8 semaines de congé paternité rémunéré à 100%. D’ailleurs, à compter de 2021, celui-là aura droit à 16 semaines de congé, comme la mère.
Cependant, la directive dite « équilibre » publiée le 20 juin 2019[8] visant à harmoniser le congé paternité entre les Etats membres de l’Union Européenne, a mis en place un seul congé paternité d’une durée de 10 jours.
Si la France venait à transposer la directive avant le 2 août 2022[9], les bénéficiaires du congé paternité verraient sa durée diminuée d’un jour.
La Commission européenne a néanmoins cherché à mettre l’accent sur le rôle des pères ou, le cas échéant, des personnes qualifiées de « seconds parents équivalent » dans la prise en charge des responsabilités familiales, dans le prisme de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.
Bénédicte Litzler
Noémie Moyal
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[1] Voir CEDH, 12 décembre 2017, n° 46386/10, K. H. Et a. c/France
[2] Cass. Soc., 31 mai 2012, n° 11-10.282
[3] L. n° 2016-1088, 8 aout 2016, JO 9 aout ; antérieurement, L. n° 2014-873 pour l’égalité homme-femme, 4 aout 2014, JO 5 aout
[4] C. trav., Art. L. 1225-4-1
[5] Loi n° 2018-1203, 22 décembre 2018, article 73 – C. trav., Art. L. 1225-35 et CSS., Art. L. 331-8 al 3 et L. 623-1
[6] Décret n° 2019-630 du 24 juin 2019 ; CNAM, Circ. n° 25/2019, du 31 juillet 2019
[7] CNAM, Circ. n°25/2019, du 31 juillet 2019 précitée
[8] Dir. Eur. 2019/1158, publié le 20 juin 2019
[9] Les Etats membres ont jusqu’au 2 août 2022 pour transposer la directive « équilibre »
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