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Aude Phelip

La performance RH est-elle un enjeu pour la productivité de l'entreprise ?


Piloter la performance des ressources humaines est un enjeu prioritaire pour tout responsable RH soucieux de mettre en œuvre de bonnes pratiques. Au-delà du respect des obligations légales, il s’agit d’évaluer l’efficacité des programmes RH dans un contexte de pression sur les coûts qui nécessite de mesurer en permanence le retour sur investissement.

FoxRH a rencontré Jean-Pierre Taieb auteur de l'ouvrage Valoriser la performance RH Un enjeu pour la productivité de l'entreprise aux éditions Dunod qui nous fait le plaisir de répondre à quelques questions.

Qu’est-ce qui vous a amené à écrire ce livre ?

J’ai écrit ce livre suite à mon expérience en tant que DRH puis en tant que conseil RH qui a montré que majoritairement les missions de la DRH sont d’assurer la gestion quotidienne et de traiter les urgences, alors que la vocation de la fonction RH est de développer les Hommes pour que l’entreprise se développe. La politique RH, quand il y en a une, se délite dans la technicité des différentes pratiques de la Gestion des Ressources Humaines GRH. Le DRH manque parfois de repères stratégiques ou laisse ses ambitions supplantées par la menée à bien de ses diverses missions.

D’ailleurs, les principaux cursus de formation en RH, Master ou autres MBA, enseignent les RH de manière modulaire tant les techniques qui composent la fonction sont diverses ; Quoi de plus différents dans les compétences requises que la direction du recrutement et celle de compensation & benefits ?

En quoi consiste le pilotage de la performance des ressources humaines et quel est son intérêt?

Le pilotage de la performance RH consiste à harmoniser les pratiques de la GRH avec la stratégie de l’entreprise, à en déduire les plans d’actions had hoc et en mesurer les effets produits. Choisir un cap ne servirait à rien si on n’était pas en mesure de s’assurer qu’on le tient et le cas échéant, de mener les actions correctrices pour le retrouver. Piloter nécessite de disposer des outils de mesure permettant à tout moment de vérifier l’efficacité des pratiques de la GRH dans la perspective d’une meilleure performance de l’entreprise.

En quoi les pratiques de la GRH influencent-elle la performance de l’entreprise ?

Les pratiques de la GRH, selon qu’elles sont « techniques » ou « stratégiques », permettent d’influencer la performance de l’entreprise si elles sont menées avec le professionnalisme qui convient : c’est leur but.

Les pratiques techniques favorisent la performance à court terme par une augmentation rapide de la productivité ou/et de la qualité, les pratiques stratégiques, elles, visent une performance à plus long terme risquant parfois de générer un surcoût à court terme.

Par exemple, lors d’un recrutement, le fait de choisir le candidat dont les compétences sont le plus proches des exigences du poste à pourvoir, va réduire la durée de la phase d’intégration et améliorer la performance de l’entreprise. Alors que le fait de baser le recrutement sur les potentialités du candidat va lui permettre une carrière qui évolue en même temps que l’entreprise mais va coûter le temps de son acclimatation au poste.








Dans votre ouvrage, on essaie de comprendre si la fonction RH répond aux enjeux stratégiques de l’entreprise et aux attentes des salariés. A travers les différents cas concrets exposés dans votre ouvrage, peut-on dire qu’elle répond ou non à ces exigences ?

Les cas concrets exposés dans mon ouvrage ont été choisis à dessein pour illustrer les meilleures façons dont la fonction RH doit répondre aux enjeux stratégiques de l’entreprise. Mais dans la réalité ces cas ne sont pas si nombreux, les actions engagées le sont souvent décidées sous la contrainte de l’urgence et dans l’objectif du moindre coût.

Quelle est pour vous la clé d’un bon développement de la performance RH ?

La performance RH reflète la bonne adéquation entre la stratégie de l’entreprise et sa déclinaison en pratiques de la GRH. Ce qui signifie un juste équilibre entre les pratiques administratives et les pratiques stratégiques, un retour plus ou moins rapide sur l’investissement.

La clé d’un bon développement de la performance RH est la prise de conscience que les bonnes pratiques de la GRH doivent impacter les résultats de l’entreprise. Encore aujourd’hui on est plus enclin à rattacher l’augmentation du CA et de la marge aux efforts des commerciaux ou de la production qu’à des pratiques innovantes de la GRH.

Quels sont pour vous les outils de mesure de la performance les plus pertinents. Comment élaborer un tableau de bord de la performance RH ?

Les tableaux de bord RH, avec les indicateurs qu’ils contiennent, sont de bons outils de mesure de la performance RH, encore faut-il qu’ils soient élaborés selon une méthodologie bien établie. Le principe d’élaboration du tableau de bord de la performance RH repose sur 3 niveaux d’indicateurs :

  1. Le premier niveau est composé d’indicateurs originels issus des politiques RH qui mesurent la façon dont les pratiques de la GRH sont mises en œuvre : indicateurs sur les domaines de la formation, du recrutement ou de la rémunération.

  2. On trouve dans le deuxième niveau les indicateurs conséquentiels qui mesurent les résultats de ces pratiques de la GRH sur les comportements des ressources humaines. Les évolutions du turn-over et de l’absentéisme par exemple reflètent bien le degré de motivation des ressources humaines. Ces indicateurs permettent de valider la pertinence des politiques RH qui sont menées. Mais lors de la mesure dégradée de ces indicateurs la politique RH n’est pas seule en cause, le management et la stratégie d’entreprise ont une part à prendre.

  3. Le troisième niveau présente les indicateurs qui mesurent les résultats économiques et financiers de l’entreprise. On trouve, le chiffre d’affaires, la marge nette, la productivité, la mesure de la qualité, etc. Lorsqu’on mouvemente positivement les indicateurs originels de la politique RH on est en droit d’en voir les premières conséquences sur les indicateurs comportementaux et ensuite la mesure d’une progression de la productivité, de la qualité et par voie de conséquence sur les résultats financiers.

L’évolution positive des indicateurs de premier niveau a des conséquences sur les indicateurs de deuxième niveau et, avec un décalage temporel, des conséquences sur les indicateurs de troisième niveau, ceux qui mesurent la performance de l’entreprise. On dit alors qu’il y a une corrélation entre les pratiques de la GRH et l’accroissement de la performance de l’entreprise.

Mais une corrélation n’est pas une démonstration de causalité, ce qui signifie qu’on n’est jamais sûr que les pratiques de la GRH mises en œuvre expliquent à elles seules l’amélioration de la performance de l’entreprise. Il y a fort à parier que les autres fonctions de l’entreprise ont elles aussi œuvré à ces résultats. De la même façon, les pratiques de la GRH peuvent être positives mais ne pas entraîner une amélioration de la performance de l’entreprise à cause de mauvais choix sur les politiques des produits ou des prix.

Pour conclure, le tableau de bord de la performance RH doit se généraliser au sein des DRH, afin de donner la mesure de la politique RH et par là même de crédibiliser les pratiques de la GRH. Même s’il n’y a pas de lien de causalité entre ces pratiques et la performance de l’entreprise, il est bon de multiplier les corrélations qui constituent alors un faisceau convergent de présomptions.

Jean Pierre Taieb ‎Owner - ‎AVISEE RH www.aviseerh.com








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